La Galerie Cipango présente en permanence les pièces de la céramiste contemporaine Yoshimi Futamura. Succédant à la série Black Hole, la série Rebirth (2017) est une réponse alchimique de l’artiste après plusieurs années, face au terrible séisme de Tohoku qui a eu lieu au Japon en 2011.
Réconcilier l’homme et les éléments
C’est une histoire cosmologique qui nous est contée par cette œuvre, dont l’éclatement exprime tour à tour la percée tragique et la libération salvatrice. L’histoire d’une lutte, d’un combat entre l’organique et le minéral, au terme duquel jaillit la fusion des deux mondes et la réconciliation de l’homme et de la nature. La terre, carbonisée, déshydratée, qui donne le sentiment d’avoir parcouru maints voyages et d’avoir traversé les âges, est le dernier vestige de cette glaise originelle dont nous sommes issus.
Substance des substances, archétype de la matière, ses rides n’annulent pourtant pas la vie qui gronde en elle. L’épreuve du feu ne l’a rendue que plus vivante ; en brouillant les pistes – qu’a t-on devant soi ? du bois, de la glace, du basalte ? Le feu a aussi permis la renaissance. A mesure que le regard s’approche, l’informe cède la place à la rêverie de formes successives – l’écorce, le flanc d’une montagne enneigée, les craquelures d’un sol depuis longtemps asséché. Les méandres de la matière exhortent l’œil à s’immiscer entre les brèches, les creux et les déchirures, à se lover dans l’intimité de la terre, dont les irrégularités et les reliefs font la beauté.
Comme sortie du cœur du monde, des bras de la nature, cette sculpture des origines ne semble plus obéir complètement au désir de l’artiste, qui a abandonné une part de son pouvoir démiurgique à l’aléatoire et laissé les éléments reprendre leurs droits.
Marion Ricard – 15 mars 2018